Huit etapes de La Chanson de Roland en une image St. Petersburg, Ms. Hermitage. fr. 88: Grandes Chroniques de France (Niederl. Burgund, Mitte 15. Jh., Exemplar Philipps des Guten), folio. 154v Original uploader was Sigune at de.wikipedia This image is in the public domain.
La Chanson de Roland • Édition classique de Léon Gautier
Deuxième partie – La Mort de Roland (Extrait)
CLXXIII
Roland frappe une seconde fois au perron de sardoine ;L’acier grince : il ne rompt pas, il ne s’ébrèche point.Quand le comte s’aperçoit qu’il ne peut briser son épée,En dedans de lui-même il commence à la plaindre :« Ô ma Durendal, comme tu es claire et blanche !« Comme tu luis et flamboies au soleil !« Je m’en souviens : Charles était aux vallons de Maurienne,« Quand Dieu, du haut du ciel, lui manda par un ange« De te donner à un vaillant capitaine.« C’est alors que le grand, le noble roi la ceignit à mon côté...« Avec elle je lui conquis l’Anjou et la Bretagne ;« Je lui conquis le Poitou et le Maine ;« Je lui conquis la libre Normandie ;« Je lui conquis Provence et Aquitaine,« La Lombardie et toute la Romagne ;« Je lui conquis la Bavière et les Flandres,« Et la Bulgarie et la Pologne« Constantinople qui lui rendit hommage,« Et la Saxe qui se soumit à son bon plaisir ;« Je lui conquis Écosse, Galles, Irlande« Et l’Angleterre, son domaine privé.« En ai-je assez conquis de pays et de terres,« Que tient Charles à la barbe chenue !« Et maintenant j’ai grande douleur à cause de cette épée.« Plutôt mourir que de la laisser aux païens !« Que Dieu n’inflige point cette honte à la France ! » CLXXIV
Pour la troisième fois, Roland frappe sur une pierre bise :Plus en abat que je ne saurais dire.L’acier grince ; il ne rompt pas :L’épée remonte en amont vers le ciel.Quand le comte s’aperçoit qu’il ne la peut briser,Tout doucement il la plaint en lui-même :« Ma Durendal, comme tu es belle et sainte !« Dans ta garde dorée il y a assez de reliques :« Une dent de saint Pierre, du sang de saint Basile.« Des cheveux de monseigneur saint Denis,« Du vêtement de la Vierge Marie.« Non, non, ce n’est pas droit que païens te possèdent !« Ta place est seulement entre des mains chrétiennes.« Plaise à Dieu que tu ne tombes pas entre celles d’un lâche !« Combien de terres j’aurai par toi conquises,« Que tient Charles à la barbe fleurie,« Et qui sont aujourd’hui la richesse de l’Empereur ! »
CLXXV
Roland sent que la mort l’entreprendEt qu’elle lui descend de la tête sur le cœur.Il court se jeter sous un pin ;Sur l’herbe verte il se couche face contre terre ;Il met sous lui son olifant et son épée,Et se tourne la tête du côté des païens.Et pourquoi le fait-il ? Ah ! c’est qu’il veutFaire dire à Charlemagne et à toute l’armée des Francs,Le noble comte, qu’il est mort en conquérant.Il bat sa coulpe, il répète son Mea culpa.Pour ses péchés, au ciel il tend son gant...
CLXXVI
Roland sent bien que son temps est fini.Il est là au sommet d’un pic qui regarde l’Espagne ;D’une main il frappe sa poitrine :« Mea culpa, mon Dieu, et pardon au nom de ta puissance,« Pour mes péchés, pour les petits et pour les grands,« Pour tous ceux que j’ai faits depuis l’heure de ma naissance« Jusqu’à ce jour où je suis parvenu. »Il tend à Dieu le gant de sa main droite,Et voici que les Anges du ciel s’abattent près de lui. CLXXVII
Il est là gisant sous un pin, le comte Roland ;Il a voulu se tourner du côté de l’Espagne.Il se prit alors à se souvenir de plusieurs choses :De tous les royaumes qu’il a conquis,Et de douce France, et des gens de sa famille,Et de Charlemagne, son seigneur qui l’a nourri ;Il ne peut s’empêcher d’en pleurer et de soupirer.Mais il ne veut pas se mettre lui-même en oubli,Et, de nouveau, réclame le pardon de Dieu :« Ô notre vrai Père, dit-il, qui jamais ne mentis,« Qui ressuscitas saint Lazare d’entre les morts« Et défendis Daniel contre les lions,« Sauve, sauve mon âme et défends-la contre tous périls,« À cause des péchés que j’ai faits en ma vie. »Il a tendu à Dieu le gant de sa main droite :Saint Gabriel l’a reçu.Alors sa tête s’est inclinée sur son bras,Et il est allé, mains jointes, à sa fin.Dieu lui envoie un de ses anges chérubinsEt saint Michel du Péril.Saint Gabriel est venu avec eux :L’âme du comte est emportée au Paradis...
Bataille de Roncevaux en 778. Mort de Roland Grandes Chroniques de France, enluminées par Jean Fouquet, Tours, vers 1455-1460 Paris, BnF, département des Manuscrits, Français 6465, fol. 113 (Cinquième Livre de Charlemagne). Bataille de Roncevaux en 778 (en arrière-plan à gauche) : Au retour de l'expédition d'Espagne, l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne, conduite par Roland, est attaquée par les sarrasins dans la vallée de Roncevaux. Mort de Roland : Le neveu de Charlemagne, Roland, comte de la Marche de Bretagne, gît sur l'herbe. Auprès de lui, son frère Baudouin se lamente avant de prendre l'olifant et l'épée Durandal de Roland pour les porter à l'empereur. Jean Fouquet (1420–1480) Domaine publique
Deuxième partie – La Mort de Roland (Extrait)
CLXXIII
Roland frappe une seconde fois au perron de sardoine ;L’acier grince : il ne rompt pas, il ne s’ébrèche point.Quand le comte s’aperçoit qu’il ne peut briser son épée,En dedans de lui-même il commence à la plaindre :« Ô ma Durendal, comme tu es claire et blanche !« Comme tu luis et flamboies au soleil !« Je m’en souviens : Charles était aux vallons de Maurienne,« Quand Dieu, du haut du ciel, lui manda par un ange« De te donner à un vaillant capitaine.« C’est alors que le grand, le noble roi la ceignit à mon côté...« Avec elle je lui conquis l’Anjou et la Bretagne ;« Je lui conquis le Poitou et le Maine ;« Je lui conquis la libre Normandie ;« Je lui conquis Provence et Aquitaine,« La Lombardie et toute la Romagne ;« Je lui conquis la Bavière et les Flandres,« Et la Bulgarie et la Pologne« Constantinople qui lui rendit hommage,« Et la Saxe qui se soumit à son bon plaisir ;« Je lui conquis Écosse, Galles, Irlande« Et l’Angleterre, son domaine privé.« En ai-je assez conquis de pays et de terres,« Que tient Charles à la barbe chenue !« Et maintenant j’ai grande douleur à cause de cette épée.« Plutôt mourir que de la laisser aux païens !« Que Dieu n’inflige point cette honte à la France ! » CLXXIV
Pour la troisième fois, Roland frappe sur une pierre bise :Plus en abat que je ne saurais dire.L’acier grince ; il ne rompt pas :L’épée remonte en amont vers le ciel.Quand le comte s’aperçoit qu’il ne la peut briser,Tout doucement il la plaint en lui-même :« Ma Durendal, comme tu es belle et sainte !« Dans ta garde dorée il y a assez de reliques :« Une dent de saint Pierre, du sang de saint Basile.« Des cheveux de monseigneur saint Denis,« Du vêtement de la Vierge Marie.« Non, non, ce n’est pas droit que païens te possèdent !« Ta place est seulement entre des mains chrétiennes.« Plaise à Dieu que tu ne tombes pas entre celles d’un lâche !« Combien de terres j’aurai par toi conquises,« Que tient Charles à la barbe fleurie,« Et qui sont aujourd’hui la richesse de l’Empereur ! »
CLXXV
Roland sent que la mort l’entreprendEt qu’elle lui descend de la tête sur le cœur.Il court se jeter sous un pin ;Sur l’herbe verte il se couche face contre terre ;Il met sous lui son olifant et son épée,Et se tourne la tête du côté des païens.Et pourquoi le fait-il ? Ah ! c’est qu’il veutFaire dire à Charlemagne et à toute l’armée des Francs,Le noble comte, qu’il est mort en conquérant.Il bat sa coulpe, il répète son Mea culpa.Pour ses péchés, au ciel il tend son gant...
CLXXVI
Roland sent bien que son temps est fini.Il est là au sommet d’un pic qui regarde l’Espagne ;D’une main il frappe sa poitrine :« Mea culpa, mon Dieu, et pardon au nom de ta puissance,« Pour mes péchés, pour les petits et pour les grands,« Pour tous ceux que j’ai faits depuis l’heure de ma naissance« Jusqu’à ce jour où je suis parvenu. »Il tend à Dieu le gant de sa main droite,Et voici que les Anges du ciel s’abattent près de lui. CLXXVII
Il est là gisant sous un pin, le comte Roland ;Il a voulu se tourner du côté de l’Espagne.Il se prit alors à se souvenir de plusieurs choses :De tous les royaumes qu’il a conquis,Et de douce France, et des gens de sa famille,Et de Charlemagne, son seigneur qui l’a nourri ;Il ne peut s’empêcher d’en pleurer et de soupirer.Mais il ne veut pas se mettre lui-même en oubli,Et, de nouveau, réclame le pardon de Dieu :« Ô notre vrai Père, dit-il, qui jamais ne mentis,« Qui ressuscitas saint Lazare d’entre les morts« Et défendis Daniel contre les lions,« Sauve, sauve mon âme et défends-la contre tous périls,« À cause des péchés que j’ai faits en ma vie. »Il a tendu à Dieu le gant de sa main droite :Saint Gabriel l’a reçu.Alors sa tête s’est inclinée sur son bras,Et il est allé, mains jointes, à sa fin.Dieu lui envoie un de ses anges chérubinsEt saint Michel du Péril.Saint Gabriel est venu avec eux :L’âme du comte est emportée au Paradis...
Bataille de Roncevaux en 778. Mort de Roland Grandes Chroniques de France, enluminées par Jean Fouquet, Tours, vers 1455-1460 Paris, BnF, département des Manuscrits, Français 6465, fol. 113 (Cinquième Livre de Charlemagne). Bataille de Roncevaux en 778 (en arrière-plan à gauche) : Au retour de l'expédition d'Espagne, l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne, conduite par Roland, est attaquée par les sarrasins dans la vallée de Roncevaux. Mort de Roland : Le neveu de Charlemagne, Roland, comte de la Marche de Bretagne, gît sur l'herbe. Auprès de lui, son frère Baudouin se lamente avant de prendre l'olifant et l'épée Durandal de Roland pour les porter à l'empereur. Jean Fouquet (1420–1480) Domaine publique
Wikisource et Wikipédia
Cette chanson me rappelle beaucoup de choses, mon ex ayant été un certain temps prof français, histoire, géo, je me souviens qu'il avait eu un cours sur le sujet mais en vieux français...
RépondreSupprimerBisous et bon week-end Claudine